Un nu-propriétaire peut-il vendre sa nue-propriété sans l’autorisation de l’usufruitier ?
L’article 595 du Code civil mentionne que le nu-propriétaire peut disposer de son droit, sous réserve de ne pas nuire aux droits de l’usufruitier (C. civ. art. 599).
Le nu-propriétaire peut donc vendre, donner, léguer ou hypothéquer le bien grevé d’un usufruit, mais il ne peut disposer librement que de sa nue-propriété.
S’il le fait sans l’accord de l’usufruitier, cela ne modifie pas le droit de ce dernier qui continue à jouir de son usufruit sur le bien s’il n’y a pas expressément renoncé (C. civ., art. 621, al. 2).
Ainsi, la vente d’un bien par le nu-propriétaire seul n’est pas nulle, elle est seulement inopposable à l’usufruitier (Cass. 3e civ., 28 mars 1990, n° 88-16.418 : Bull. civ. III, n° 92), sauf la responsabilité encourue par le vendeur envers son acquéreur.
Par conséquent, s’il s’agit de céder exclusivement la nue-propriété ou l’usufruit il n’est, en principe, pas nécessaire d’obtenir d’autorisation préalable, sous réserve des stipulations de l’acte constitutif du démembrement. En effet, le démembrement peut avoir une origine successorale mais peut aussi avoir une origine conventionnelle et en ce cas, il est possible que l’acte constitutif contienne des clauses particulières qu’il faudra étudier au cas par cas.
Par exemple la nue-propriété peut provenir d’une donation, par un plein propriétaire, de la nue-propriété à ses enfants. Il est alors très courant que l’acte de donation prévoit une clause d’interdiction d’aliéner. Dans ce cas, il convient donc de faire tomber l’interdiction en demandant l’accord du ou des usufruitier(s).
Dans la pratique, il est très fortement conseillé à un nu-propriétaire d’informer préalablement l’usufruitier de sa volonté de céder sa nue-propriété, voire de recueillir son accord, afin d’éviter des complications ultérieures.
En définitive, c’est dans le cadre de la vente de la pleine propriété du bien qu’il est nécessaire que les 2 propriétaires de droits démembrés soient d’accord puisqu’il s’agit alors de la vente concomitante des droits respectifs de chacun.
Dans ce cas, la vente ne peut se faire sur la seule initiative du nu-propriétaire. L’accord de l’usufruitier est nécessaire. Le juge ne peut pas non plus ordonner la vente du bien sans son accord (C. civ., art. 815-5, al.2) même si ce dernier n’occupe plus le bien (Cass. 1re civ., 17 janv. 2006, n° 04-13.789, n° 75, Bull. civ. I, n° 23).
Le juge ne peut, si les immeubles indivis ne peuvent être commodément partagés ou attribués en nature, qu’ordonner la vente par licitation devant le tribunal, laquelle ne portera que sur la nue-propriété (Cass. 1re civ., 14 mai 1996, n° 94-15.028).